Chacabuco se situe au nord du Chili dans le désert d’Atacama, un des déserts les plus arides de la planète. Malgré des conditions totalement inhospitalières, plus de 5000 personnes sont venus s’y installer pour exploiter le salpêtre dans la première moitié du 20ème siècle. Des installations urbaines complètes (hôpital, école, théâtre, terrain de sport…) ont permis l’autosuffisance de cette population. Ce fut une oasis sociale et culturelle entièrement close, un lieu de lutte pour la vie mais aussi de lutte contre l’exploitation des chefs d’entreprise essentiellement étrangers. A partir de 1945, le salpêtre s’est vu concurrencé par le nitrate synthétique et Chacabuco est devenu une ville fantôme, abandonnant toutes ses infrastructures industrielles, sociales et culturelles. En 1973, Chacabuco est redevenu tristement célèbre en se transformant en lieu de détention de plus de 1500 prisonniers politiques de la dictature Pinochet. Délimité par des fils de fer barbelés, des miradors et des mines anti personnelles, Chacabuco, prison à ciel ouvert, redevient pour une seconde fois, un lieu clos.
Aujourd’hui Chacabuco est retournée à son état de ville fantôme, l’épithète n’est pas anodin dans son rapport à la spectralité. L’espace se fait hantise par le fait que le passé s’attarde dans le présent. La ville fantôme est perçue alors à travers une oscillation entre disparu et revenant. Quand le vent souffle et que les planchers craquent à Chacabuco, l’absence se fait présence et l’être du passé n’en finit pas de survivre, les fantômes des disparus du régime de Pinochet hantent ce monde dévasté. Contre l’oubli.