Estomper la frontière entre la matière et le vivant,
Capter le souffle de vie qui anime la matière, la fait respirer.
Rechercher l’esprit des choses,
Leur donner une âme.
Prêter attention à tout ce qui est silencieux.
« L’obsolescence de l’homme » est le titre de deux recueils d’études de Günther Anders écrits il y a plus d’un demi-siècle et pourtant d’une criante actualité. Selon Anders, il y a quelque chose de périmé en l’homme, son humanité elle-même. Date du début de péremption : 1945, quand se conjuguent la découverte d’Auschwitz et les bombes d’Hiroshima et de Nagasaki.
Cette série a été produite pendant le confinement de 2020. Ces vanités contemporaines mettent l’accent sur le chaos pandémique, la désorientation fondamentale qu’il a instaurée, l’idée de vulnérabilité, la présence de la mort inhérente à toute vie. Son titre a été inspiré par la lecture d’un ouvrage éponyme du philosophe Jean Luc Nancy.
Cette série de portraits est issue de mes déambulations dans des bazars iraniens et libanais. Ces mannequins portent les stigmates de la maltraitance et de l’usure mais restent beaux de par leur fonction de porter « beaux atours » mais aussi par un air d’humanité qu’ils semblent dégager. Ils évoquent pour moi une métaphore, celle des peuples d’Iran et du Liban qui restent debout et dignes malgré les coups portés par une politique corrompue, machiste, liberticide profondément inégalitaire.
A Erna et Paulette.
Enfant, il y avait ces images emprisonnées dans une boite à chaussures, ces vies de papier que je me délectais de libérer, de découvrir et de redécouvrir maintes fois sans jamais me lasser, ces inconnu.e.s dont je faisais, défaisais et refaisais l’histoire et dans ce bazar de l’enfance à la fois heureux et douloureux, je trouvais l’imaginaire comme survie.
Chacabuco se situe au nord du Chili dans le désert d’Atacama, un des déserts les plus arides de la planète. Malgré des conditions totalement inhospitalières, plus de 5000 personnes sont venus s’y installer pour exploiter le salpêtre dans la première moitié du 20ème siècle. Des installations urbaines complètes (hôpital, école, théâtre, terrain de sport…) ont permis l’autosuffisance de cette population.
Abandonné à la rouille et au verre cassé, Chacabuco inspire une rhétorique mortuaire associée aux rebuts où corps et maisons se rejoignent en une même finalité de cadavre, de carcasse, de squelette, insistant sur la matérialité, la décomposition, le délabrement.
Cette série d’images est issue d’un voyage au Japon. Contrairement à notre culture, la culture japonaise cohabite avec d’autres mondes avec lesquels elle échange et communique, toujours prête à l’irruption/disparition d’une altérité radicale insoupçonnée. Entités surnaturelles incontrôlables par les humains, les yôkai représentent cette altérité et peuplent ces mondes.
Cette série de dépaysages fait suite à la série des terrae incognitae. Alors que nous sommes à l’ère de la mondialisation, la libre circulation n’existe pas pour tous, les politiques migratoires multiplient et allongent les murs.
La relation de l’homme à sa planète se définit davantage par un déplacement à la surface de celle-ci que par un attachement à une zone spécifique. Des millions de personnes se déplacent par contrainte ou par choix, pour des raisons politiques, économiques ou climatiques, remettant en cause la sédentarité, le fait d’être ici et pas ailleurs, le fait d’être stabilisé dans une région, dans une nation.
J’ai intitulé cette série animot(s), terminologie que j’ai empruntée à Jacques Derrida, philosophe de la déconstruction, et entre autre de la déconstruction de la tradition philosophique qui s’échine à démarquer fondamentalement l’homme de l’animal alors même que l’homme en est issu. En travaillant sur le thème de l’animalité, j’ai effectivement très vite été confrontée à l’impensé du concept.
Hétérotopie: étymologiquement lieu autre. Indique aussi la différence, le contraire, l’opposé. Concept élaboré par Michel Foucault selon lequel, contrairement aux utopies qui n’ont pas de lieu, les hétérotopies sont des lieux bien réels mais totalement autres, tout autre des espaces dans lesquels nous évoluons quotidiennement. Comme lieu de l’altérité, ce sont des espaces qui font exception et qui peuvent être vécu aussi comme des espaces d’exception.
Copyright Martine Tanné (2019)
Réalisé par Andry RASABOTSY (www.zeninfo34.com)